Les copines m’avaient pourtant prévenue
: bébé qui descend « jusqu’aux genoux », le bouchon muqueux qui se tire depuis une semaine, ça peut être des signes.
Mais je me suis tellement bien vissée dans la caboche qu’il naîtrait à 40SA comme Jo
, et comme y a pas plus têtu qu’une mule
… Bref, 38SA, les nerfs en pelote, Jo qui vomit partout depuis 4 jours
, la 2ème SF du moment qui me botte moyen, nous sommes le 2 avril, franchement, j’ai autre chose à foutre
. En plus, à la dernière écho vendredi, le gyné évaluait un petit 3kg200
, alors forcément il doit grossir encore un peu, vu le gabarit de ses soeurettes…
Mouhouhouhaha !!!
Et donc, des contractions se pointent en fin de matinée, gentilles, disparates
… boarf, un « faux » travail, c’est toujours bon à prendre, ce qui est fait n’est plus à faire
…
11H23, j’écris sur le forum : « ...on va voir si aujourd'hui je peux lâcher ma serpillière y a intérêt parce que là je sens que mon col se fait la malle je continue à perdre le bouchon muqueux, j'ai les hanches en chewing-gum et je dors de nouveau super mal, ouillch!
J'en ai marre de marre...et en même temps j'ai été prise de panique hier en me disant "je suis pas prête du tout du tout moi! " je balise à mort et le fait que ce soit un garçon me turlupine de plus en plus...» … et je ne percute pas !?!?!? grosse nigaude va !
13H21, nouveau message, je commence quand même à me poser des questions
: « bon, celles qui ont connu un faux travail, ça douillait quand même un peu? (dites moi oui!
) parce que là non, Jo vomi encore, nom di djû, et j'ai des contractions qui douillent un peu pas envie pas envie pas envie
pas today
Alain rentre à la maison, c'est déjà ça
»
…A 16H00, je m’autorise encore à douter
, à espérer un faux départ
, de toute manière j’attends une visite de ma SF à 17H30, on verra bien, en attendant je prends un bain pour calmer le truc.
17H30 et des brouettes, ma SF se pointe, je lui fais un topo, lui dis que je ne suis pas prête, que Jo vomit partout, que je doutais encore jusqu’à il y a un quart d’heure, mais que là
… elle me propose de regarder où j’en suis, OK… 3 cm, bon ben je pense qu’il va falloir me faire très vite à l’idée que j’accouche, hein
.
Je suis fâchée
, je déteste qu’on m’impose kék chose
, ma SF me demande ce que je veux, je n’ose pas lui dire que je veux qu’on me foute la paix
, alors je lui suggère de rentrer chez elle le temps qu’on voit l’évolution
… puis j’ai super la dalle
et je ne pense plus qu’à bouffer t’façon !
Le dîner est justement prêt, j’essaie une dernière fois de poursuivre l’illusion que c’est une journée comme une autre
et j’assure à Alain que je vais manger avec eux
… mais les filles sont infernales et les contractions ne font pas bon ménage avec l’agitation
. Je vais finalement dévorer mon repas dans ma chambre, penchée sur mon assiette
pour encaisser entre deux coups de fourchettes les contractions
. Ensuite je regagne mon bain.
Un peu avant 19H00, je commence à avoir mal, à avoir peur, je crie à Alain de rappeler la SF et de lui demander de revenir FISSA ! Elle n’a pas eu le temps de manger, mais elle arrive très vite
. Entre temps, la mamie est arrivée aussi pour s’occuper des filles et Alain peut enfin me rejoindre
. Mais je ne sais plus ce que je veux, je veux être seule, je ne veux pas qu’on me laisse… je fais des sons dans mon bain, ça fait du bien, ça m’aide à maîtriser un peu ma peur…
Et vient une contraction vraiment différente, ça y est, je le sais. Je dis à Alain et à T qu’il faut m’aider à sortir du bain, Lucien arrive ! Ils me hissent hors de la baignoire et je sors alors du temps, il devait être environ 19H30… Une fois installée sur mon lit, T vérifie la dilatation, 8cm. Suis-je restée bloquée sur cette information ? Toujours est-il que les poussées ont commencé je ne sais quand et que j’ai alors complètement perdu les pédales, les questions se bousculent dans ma tête, emportées dans le tourbillon des poussées, devenues d’autant plus puissantes, presque violentes, je crie, je râle, je voudrais pouvoir râler plus fort car ça ne me soulage plus, je panique complètement et je pense « je ne suis pas à dilatation complète !.. ? je vais me déchirer !... ? J’ai trop mal ! Je veux que ça finisse !!! Je vais pousser !... mais je vais me déchirer !... ???... » Ça n’en finit pas, je n’en peux plus de douleur et de terreur. J’entends que Alain et/ou T me parle(nt) mais je n’écoute pas, mon cerveau est trop emballé… et, lors d’une poussée, je décide que je n’en peux plus, et je pousse de toute mes forces, et la tête sort d’un coup, et je sais que le plus dur est enfin fini, et je demande même si ça y est
, si il est sorti, et on me répond quelque chose comme « presque », et je repousse un coup, tout aussi fort, et Lucien sort enfin, comme une savonnette
Et Alain fond en larmes, comme pour chacun de ses enfants
.
Il est 19H57, je m’effondre en sanglots, la tête toujours enfouie dans les coussins, dans cette même position que je n’ai pas quitté, que je n’ai jamais osé quitter, à quatre patte, le buste et la tête enfouie dans une montagne de gros coussins, je n’étais décidément pas prête
… On me demande si je veux mon bébé, mais je ne réponds pas
, j’ai besoin de quelques secondes encore pour sangloter dans mes coussins que j’étreins
.
Rapidement, je retrouve mes esprits, mais je tremble comme une feuille, je suis épuisée, je cherche comment me retourner
, je finis par prendre Lucien dans mes bras, relevée à genoux sur mon matelas. Le cordon me gène, le placenta doit encore sortir, bon et bien je pousse encore un bon coup et celui-ci sort d’un coup, je peux enfin m’installer
. Mon bébé lotus
a un cordon énorme ! T a du mal à le clamper avant qu’Alain puisse le couper.
L’épisiotomie que j’ai subit pour Madeleine a complètement lâché
, les SF me montrent : un vrai coup de hache !
Il faut recoudre car là, les bords sont trop éloignés, bon, soit
. Les points dans le périnée passent super bien, par contre ceux dans l’épiderme sont hyper désagréables
, j’accepte difficilement qu’on finisse. Mais j’ai déjà retrouvé ma bonne humeur, on discute des évènements, je raconte comment j’ai perdu mon sang froid
, ma SF s’en étonne
, car mon comportement lui a semblé toujours normal.
Je me pose alors la même question qu’après la sortie de Jo : « est-ce que j’en veux toujours 4 ? »
, je me sens un peu triste d’avoir la pensée « on l’adoptera »
. J’ai vraiment eu peur ce jour là, pour des raisons qui me restent à comprendre, j’ai déjà commencé à remettre certaines choses en place en écrivant ce récit pour vous
, c’est tellement fantastique de s’enrichir même – surtout ?... - des épreuves ! Rien que d’avoir écrit tout ça, je me sens déjà à nouveau l’envie de faire notre prochain enfant… dans 4 ans ?
...
Ce qui me laisse du temps – je m’en rends compte à l’instant en me relisant - pour rendre à mon bébé plus de place dans mes pensées qu’il n’en a eu dans ces instants éprouvants
, ainsi que pour comprendre tous le sens de ce moment-cadaux dans ma vie
…
Merci à vous toutes pour m'avoir épaulée tout au long de cette grossesse