Lucien

Lucien était recroquevillé sur lui-même. C'était-là une position qu'il lui paisait de prendre. Il ne s'était jamais senti aussi heureux de vivre, aussi détendu. Tout son corps était au repos et lui semblait léger. Léger comme un plume, comme un soupir. Comme une inexistence. C'était comme s'il flottait dans l'air ou peut-être dans l'eau. Il n'avait absorbé aucune drogue, usé d'aucun artifice pour accéder à cette plénitude des sens. Lucien était bien dans sa peau. Il était heureux de vivre. Sans doute était-ce un bonheur un peu égoïste.

Une nuit, le malheureux fut réveillé par des douleurs épouvantables. Il se sentit comme serré dans un étau, écrasé par le poids de quelque fatalité. Quel était donc ce mal qui lui fondait dessus? Et pourquoi sur lui plutôt que sur un autre? Quelle punition lui était là infligée? C'était comme si on l'écartelait, comme si on brisait ses os à coups de bâton. "Je vais mourir", se dit-il. La douleur était telle qu'il ferma les yeux et s'y abandonna. Il était incapable de résister à ce flot qui le submergeait, à ce courant qui l'entraînait loin de ses rivages familiers. C'était comme si un carcan l'emprisonnait de la tête aux pieds. Il se sentait attiré vers un inconnu qui l'effrayait déjà. Il lui sembla entendre une musique abyssale. Sa résistance faiblissait.

Le néant l'attirait vers lui.

Un étrange sentiment de solitude l'envahit alors. Il était seul dans son épreuve, terriblement seul. Personne ne pouvait l'aider. C'était en solitaire qu'il lui fallait franchir le passage. Il ne pouvait en être autrement. Ses tempes battaient, sa tête était traversée d'ondes douloureuses. Ses épaules s'enfonçaient dans son corps. "C'est la fin", se dit-il encore. Il lui était soudain impossible de faire un geste.

Un moment, la douleur fut si forte qu'il crut perdre la raison et soudain ce fut comme si les mains de Dieu l'écartelaient. Un éclair l'aveugla. Non, pas un éclair, une intense et durable lumière plus exactement. Un feu embrasa ses poumons. Il poussa un cri strident.

En le tirant par les pieds, la sage-femme s'exclama, d'une voix tonitruante: "C'est un garçon!". Lucien était né.

c'est superbe merci hina

C'est une collègue que me l'a passée, je trouvais ça tellement original!

C'est vraiment poignant ...

En même temps, ça m'effraie de penser la naissance de mes enfants dans la souffrance ... Comme le terme "traumatisme de l'accouchement" pour le bb, ça me gène. Je me dis que quelque chose de naturel, si c'est respecté, ne peut être aussi douloureux...
On dit bien que c'est le bb qui déclenche le moment de sa naissance, pas le corps de la mère ...

c'est marrant le titre... pas touche hein les parturientes!

(...mais moi non plus je n'immagine pas que ce soit finalement tellement trauma tisant pour le bébé, puisqu'il y en a qui naissent endormis! )

Je ne sais pas non plus que penser de l'aspect douleur... Raphaël a eu mal, très certainement (quoique? il n'a poussé qu'un petit vagissement, après il était tout calme et me regardait...).
Je trouvais surtout intéressant ce récit vu "de l'autre côté".

Je ne suis pas convaincue par le coté douleur vue par un adulte... mais le texte est beau...

En tout cas, quand AZF a sauté, j'étais dans mon bureau, je l'ai déjà dit sans doute ... Je radote en tout cas, j'ai revécu à coup sur ce que nous avons tous vécu au sortir du ventre de notre mère : une solitude incommensurable, un ailleurs totalement irrépressible, sur lequel on a aucune prise... mais cette solitude !! C'était celle du nouveau né.

D'où le fait que je suis comme vous toutes, mais en m'en étant souvenue d'une certaine façon, très à cheval sur l'accueil du nouveau né et le fait qu'il ne faille jamais le lacher d'une semelle, au moins une présence parentale par la voix si c'est impossible par le toucher.

D'où le fait que pour la naissance d'Arwen, moi puis son père sommes restés à ses cotés, branchés à elle, et que pour Petitou, il ne décollera pas de notre contact physique non plus LOL

alors là, j'accroche pas mais pas du tout...
mis à part peut-être le premier paragraphe mais sinon le reste est trop loin de mes représentations sans doute pour me toucher...
A moins que ce soit, le refus de ce souvenir d'une expérience similairement douloureuse...
En tout cas, j'espère de toutes mes forces que même si douleur il y a, il y a quelque part aussi de la curiosité, de l'espoir, de l'attente, de la chaleur, de la joie pas seulement de notre part mais aussi de la part du bébé (même si je peux imaginer que ce soit quand même brutal au moins parfois)!

Tiens ça m'intéresserait d'avoir ton avis Bagh!

mon avis c'est que ce texte a certainement été écrit par quelqu'un qui aurait pu dire que la mort, ce n'est rien d'autre que de se décomposer et se faire bouffer par des p'tits vers à mouches... ce qui se défend, d'un point de vue purement factuel !

la naissance "côté bébé", grâce à pinpin, j'en ai une petite idée. en tout cas en ce qui le concerne, lui !
ça serre fort, ya trop de lumière, fait pas chaud dehors.
mais il n'a pas dit que c'était douloureux, juste qu'il fallait "se mettre comme ça" c'est à dire dans la position dans laquelle il est né, bras croisés, tête rentrée, yeux fermés très fort.

il me semble évident que pour chaque enfant c'est complètement différent ! le fri n'a rien raconté, mais il est né en avion avec les yeux grand ouverts. et pourtant, lui, je suis sûre qu'il a souffert

aelig, non, pas souffert, ça aussi, ça me semble évident, et c'est tant mieux parce qu'elle s'est bien rattrappée après la pauvre chérie.

voilà mon avis, suivi de ma mince expérience de maman-parturiente

Bagh

Né en avion, c'est à dire ????????

avec les bras écartés pas dans un avion !

OUARFFFFFFFFFFFFFFFFFFFF je voulais être sure LOLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLLL pliée de rire devant mon PC ma Bagh !!!!