j'ai écrit le récit de naissances d'aelig le 31 décembre 2003.
(j'édite pour mettre en post-it, parce que je ne veux pas que la 2ème partie soit plus haut que celle-ci dans la liste des sujets de discussion)
Pour moi, cette année, Noël est tombé le 13 décembre.
Il y avait un soleil magnifique, une lumière de printemps. J'avais des contractions depuis 3 jours, mais je savais que le jour qui se levait serait celui où je tiendrai enfin mon bébé dans les bras.
Je me suis levée vers 8h, plus possible de rester couchée, les contractions se rapprochaient, et mon amoureux dormait trop bien pour que j'ose le réveiller... Je devais reprendre contact avec mon corps toute seule, sentir tout ce qui se passait en moi, et laisser aller.
J'ai commencé par aller aux ouatères, histoire de...
Puis j'ai emballé vite fait le cadeau de Noël de ma soeur, en plusieurs fois, entre 2 contractions, parce que je savais qu'elle viendrait quand Aelig serait là, et je ne voulais pas qu'elle tombe dessus !
J'ai aussi caché celui de son mari (pas pu l'emballer, les contractions étaient de plus en plus rapprochées et douloureuses), tellement bien que je ne l'ai toujours pas retrouvé !
Vite, regonfler mon gros ballon, à bloc, pour qu'il me soutienne et m'aide à faire bouger mon bassin.
Vite, pipi ! (Qu'est-ce que j'ai pu boire et faire pipi pendant cet accouchement !)
Vite, rebondir sur le ballon ! Rebondir tellement haut que je volais au-dessus du ballon, les pieds ne touchant plus terre !
Oups. Une dose de granules d'Arnica... En prévision... Il est environ 9h30...
J'ai bien fait de les prendre...
Je commence à aller et venir entre l'entrée - et mon ballon, et le salon - et les playmobils des garçons !
Eh oui. Entre 2 contractions, donc pendant quelques secondes à chaque fois, je joue aux playmobils. J'installe le décor "crêche" et je place les petits personnages...
Au bout d'un moment, le ballon ne me soulage plus. Il faut que je me mette dans l'eau. Un coup d'oeil dans la chambre où le papa dort encore comme un bienheureux, ok, j'ai compris, je me le fais couler moi-même mon bain !
Pas facile de se pencher au-dessus de la baignoire pour mettre la bonde...
Ni de tenir assez longtemps pour régler la température de l'eau... Mais à cœur vaillant rien d'impossible !
Vers 10h30, dans mon bain, je commence à ne plus supporter la douleur, j'ai besoin de sa présence, et c'est le moment d'appeler la sage-femme. J'appelle, pour le réveiller... Tu veux bien appeler s'il-te-plaît ?
Et voilà un papa tout ému qui appelle et rappelle la sage-femme. "Elle demande si elle doit venir tout de suite ?" Mais j'en sais rien moi !!!
"Est-ce que les contractions sont régulières ?" Ben non, mais je n'ai jamais eu de contractions régulières et pourtant j'ai 2 enfants... "Elle veut te parler..."
Et là j'ai à peine pris le téléphone (dans le bain, paaaaas bien !) que j'entends : "Oh ! Ca c'est une voix qui accouche ! J'arrive !"
Oui. C'est bien. Viens.
Je me sens mieux, même si c'est samedi, jour de marché, et pas de place pour se garer... Je sais qu'elle va bientôt arriver et j'ai tellement confiance en elle...
Je fais les baleines dans le bain, je dis beaucoup de choses, je crois, sans réfléchir à rien...
Beaucoup de "fait ch..." surtout !
"Fait ch... Ultraman !" est entré dans la légende, parce qu'Ultraman n'a jamais aussi bien volé que quand je l'ai chopé sur le rebord de la baignoire pour le lancer à travers la salle de bains...
"Fait ch... la pomme de douche, aussi..."
Je crie sous l'eau, ça fait des bulles, c'est rigolo, ça amuserait mon boud'chou, il adore que je fasse des bulles dans le bain...
Je pense à lui, qui attend sa petite soeur avec tant d'impatience...
Quand les contractions arrivent, je bouge dans tous les sens, ça fait des vagues... "Fait ch... la baignoire" qui est si étroite ! Et en même temps je m'appuie sur les parois, ça me sécurise, je peux me laisser aller complètement.
K ne bouge pas, il reste accroupi près de la baignoire, il me regarde.
Depuis que je l'ai réveillé, j'ai besoin de sa présence permanente, mais je ne supporte pas qu'il me touche (un scoop !), à peine qu'il me parle, et pas tout le temps. C'est bien, il respecte ça.
En fait il doit être assez impressionné, à y repenser, c'est furieusement sauvage ce qui est en train de se dérouler sous ses yeux.
Il sort de la salle de bains au moment où je ressens le besoin impérieux de me relever, de sortir de la baignoire. (Ca fait quelques minutes que je dis que l'eau va être craspouille, j'ai fait pipi dans le bain et il va falloir changer l'eau. En fait je n'ai plus besoin de ce bain...)
C'est bien. Il me voit depuis le couloir, j'essaie de m'accrocher au barreau du rideau de douche.
Verticale. Je dois être verticale. Juste un moment.
Ensuite, vite vite, mon ballon. Je le coince entre ma commode et la porte de ma chambre, et je rebondis de nouveau.
Il est 11h10 (je le découvrirai plus tard !) et la sage-femme arrive. Pas de place pour se garer, K doit descendre chercher les 2 ou 3 tonnes de matériel qu'elle apporte okazou, et elle ira au parking ensuite.
Me revoilà toute seule. Il y a trop de lumière, je dois fermer les rideaux de la chambre des garçons qui laissent passer le soleil jusqu'ici.
Impossible de faire 2 mètres. Je vais rebondir comme une folle sur mon ballon, qu'est-ce que ça soulage !
Voilà K qui remonte. Tu veux bien fermer les rideaux des garçons s'il-te-plaît ? Ouf ! Merci !
Argh !!! Fait ch... le ballon !!! Il FAUT que je me mette sur le lit, à 4 pattes, tout de suite !
Le lit est à moins d'un mètre, j'ai juste le temps de me jeter dessus... Pas tout à fait, d'ailleurs, j'ai encore une patte par terre, mais voilà déjà une autre contraction. Elles sont très violentes, je dois être à dilatation complète - mais bien sûr je ne pense pas du tout à ça !
Je laisse mon corps faire son boulot, et je le suis.
J'arrive enfin à me hisser entièrement sur le lit, puis, toujours entre deux contractions, à attraper un oreiller dans lequel j'enfouis ma tête pour crier. J'ai fait ça sans y réfléchir, mais si les voisins savaient ils me remercieraient !
Je crie que je ne veux plus accoucher.
La sage-femme arrive, elle écoute le coeur de mon bébé. Elle essaie d'abord dans le bas de mon ventre, puis plus bas, et elle y arrive finalement dans le creux de l'aine. Youpi !!! Elle est tout près alors !!!
Est-ce que j'ai envie de pousser ?
Non.
Mais je n'ai jamais eu envie de pousser pour les garçons, et je suis persuadée que ça serait venu plus tard si on ne m'y avait pas forcée.
La très sage femme me dit que si je n'ai pas envie c'est que ça ne doit pas être le moment.
Qu'est-ce que je l'aime cette femme !!!
Elle essaie d'écouter de nouveau le coeur du bébé, mais je la jette. Elle me dira plus tard que c'est bon signe : on n'a jamais vu un bébé aller mal et sa maman refuser qu'on écoute son coeur.
Mais je sens que ça vient. Il faut que je laisse pousser.
Et là, soulagement, je me vide complètement. Pipi, caca, et la poche des eaux qui apparaît.
Ca me fait un bien fou, mais la douleur revient vite.
J'ai du mal à accompagner mon bébé.
Je la retiens, parce que j'ai mal.
"Ne la retiens pas, laisse aller... Comme ça..."
Et quand je l'accompagne, je ne crie plus, je suis de toutes mes forces avec elle. Allez mon bébé, vas-y !
Tu es si forte, je dois rester avec toi, je dois t'aider...
Aaaaaaaaah !!! Mais ça fait si maaaaaal !!!
"Doucement, accompagne-la..."
Et de nouveau, je me calme, et je reviens avec ma petite fille...
3 fois, je refuse de la laisser aller, 3 fois je reviens avec elle et je l'accompagne vers le monde.
Du moins c'est comme ça que je l'ai ressenti.
Bien sûr, je n'ai aucune notion du temps ni de l'espace à ce moment-là...
La voilà. Elle arrive.
Son papa a mis ses mains en coupelle pour l'accueillir.
J'entends la sage-femme lui demander : "tu veux finir ?", et je sais que c'est lui qui va mettre son enfant au monde. Bonheur.
"Est-ce que tu veux que je te la passe ?" me demande la sage-femme.
Non non ! Donne-la à son père. Je suis tellement fatiguée...
Et toujours en position de prière musulmane.
"Elle s'était fait une bretelle avec son cordon."
"Il est assez court, il va falloir le couper, que tu puisses bouger..."
Non ! Euh ? Tu crois ? Il faut vraiment ?
"Il ne bat plus..."
Ah. Alors d'accord.
Le papa coupe le cordon, et prend son bébé. Je lui dis de la mettre sur sa peau, pas sur un vêtement...
On est tous les quatre dans la pénombre, il n'y a plus de bruit...
La sage-femme est sortie un moment, pour nous laisser faire connaissance, et respirer ce silence.
Et en profiter pour remplir le dossier...
Je prends mon bébé dans les bras. Qu'elle est douce !
Que je l'aime !!!
La sage-femme revient voir si le placenta sort. Il n'est pas décollé.
Aelig dans les bras de son papa semble vouloir téter.
Ca tombe bien.
Je la branche, assise sur une bassine, et elle tète comme une chef.
Quel bonheur. Et quel soulagement quand le placenta tombe dans la bassine !
Dis, il est comment ?
"Entier."
Ouf.
Ma petite chérie tète insatiablement.
Elle ne me fait pas mal, du tout. C'est du pur bonheur. J'ai plein de colostrum, et elle tète. Pendant 1 heure.
Quand elle s'endort enfin, repue, la sage-femme regarde mes 2 petites déchirures, une au vagin et une au périnée. Pas la peine de recoudre, ça se soignera tout seul. Cool.
Vous devez avoir faim, tous les deux...
Il reste du suuuuuper gâteau au chocolat d'hier soir...
Et de la quiche aussi...
Je reste avec ma fille. Qu'est-ce que je l'aime !
Après le départ de la sage-femme, j'appellerai mes garçons chez leur père - fous de joie, pour qu'ils viennent voir leur soeur, et ma môman qui est au marché et va fêter ça en retournant faire un tour pour plein de victuailles.
Elle se chargera de prévenir ma soeur et mon beau-frère qui sauteront dans le train. Ce soir, c'est la fête à la maison !
Mon bébé dans les bras, son papa près de moi qui me donne des huîtres et du champagne...
Maman, ma soeur et son mari assis sur le lit, c'est Noël. Un enfant nous est né.