[césarienne] Joyce, une petite fille qui en a...

Ma toute belle, ma superbe princesse...
Je t'ai endormie sur le fauteuil et j'en profite pour t'écrire. Je me sens bizarre, comme vide, quand tu n'es pas contre moi, quand je ne te touche pas mais j'avais besoin de te raconter ta naissance et, y a rien à faire, taper à une main enlève pas mal de spontanéité...
J'avais besoin de t'écrire maintenant, le plus vite possible, parce que ça fait moins de deux semaines que tu es avec nous mais, déjà, les souvenirs se font flous, un voile couvre peu à peu les détails, comme si ce n'était pas ma, notre naissance mais une histoire qu'on l'aurait racontée. Tu es là, tout près de moi, et pourtant j'ai encore tellement de mal à réaliser...
Le 18 avril... Non, cette naissance a commencé bien avant, dès le moment où tu m'as choisie et où tu t'es lovée dans mon ventre. Je savais que tu serais unique, parfaite, si douce... je le savais de tout mon être. Je savais aussi que tu serais une petite fille. Calme mais avec du caractère, une petite fille qui sait ce qu'elle veut. Et tu nous l'as prouvé assez vite.
Malgré les premiers moments d'inquiétude quand on m'a dit que notre placenta était previa, je n'ai pas douté longtemps de ta capacité à régler ce détail et on n'y a plus pensé.
Les mois passaient, ma grossesse était heureuse. Mes hormones étaient en ébullition, mes émotions tempêtaient mais quand j'étais seule avec toi, je savais que rien ne pouvait nous toucher. À deux, on était les plus fortes ! Et puis, on avait Ticky et Show qui veillaient sur nous, qui dormaient sur mon ventre, qui jouaient avec toi, à travers moi.
Show nous a quittés le 31 mars et j'ai failli perdre pied. Je ne comprenais pas comment ça pouvait nous arriver maintenant. Il avait fait partie de toute ton évolution et il ne serait pas là à ta naissance ? Ça n'avait pas de sens. Mais tu avais besoin de moi et Ticky avait besoin de réconfort, lui aussi. On a donc continué ensemble, avec Show qui nous suivait dans nos coeurs.
Je savais que notre placenta s'était déplacé mais il fallait qu'on aille quand même vérifier ça. On repoussait, on repoussait... Ton papa n'avait pas vraiment le temps (et je voulais qu'il soit là) et puis moi je n'en voyais pas vraiment l'intérêt... Le 7 avril on y est finalement allés. Ils nous ont fait attendre plus d'une heure (on a appris, après coup qu'on avait « été si gentils de laisser passer l'autre maman avant nous ») et, pendant les 10 minutes où elle a daigné nous voir, la technicienne nous a dit 3 phrases « placenta ok », « oh, un pied, vous aurez besoin d'une césarienne » et « vous pouvez vous rhabiller » ! On était sous le choc. On voulait te voir, nous... Oui, ok, la prescription était pour vérifier l'emplacement du placenta mais merde, elle nous avait fait attendre plus d'une heure, on était là, elle pouvait au moins nous montrer... je sais pas, moi, ton visage, quelque chose... Et puis c'était quoi cette histoire de césarienne ??

Ça faisait plusieurs semaines que tu étais tête en-bas... Ou du moins c'est ce qu'on pensait...
Kelli est venue nous voir à la maison le lendemain. Elle était furieuse quand on lui a parlé du comportement de la technicienne (et elle a porté plainte) et nous a rassurés. On a longuement parlé de ta position, de ce que je pouvais faire pour te faire tourner, de ce que ça impliquait si tu restais comme ça... Si tu restais en siège, elle n'avait légalement pas le droit de nous aider à naître à la maison.
Elle nous a donné le téléphone d'une ostéopathe mais je voulais d'abord en discuter avec toi, essayer de te convaincre, t'aider à tourner. Je cherchais de 'laide sur le net, des astuces, des exercices, n'importe quoi... Comme toujours, je ne te sentais pas beaucoup bouger. Tu t'étirais dans tous les sens mais est-ce que tu tournais ? Avec ton papa, on essayait de se fier à ce qu'on croyait sentir. Était-ce ta tête ? Tes petites fesses ? Ça changeait à chaque fois, au point qu'on t'a rapidement surnommée « bébé-pirouettes ». La semaine suivante on est allés chez Kelli et on a bossé avec elle pour essayer de te faire tourner. Tu bougeais, tu te mettais de travers, çà on le savait, mais après ça ?
Le lendemain, j'ai appelé Cindy et elle m'a dit d'y aller directement. On a beaucoup parlé, elle m'a expliqué ce qu'elle allait faire... En fait, depuis qu'on m'avait dit que tu étais en siège, je m'étais pas mal basée sur l'idée que si tu avais choisi cette position, tu avais tes raisons et je ne voulais pas douter de ton jugement. Plus que moi, tu savais ce qui était bon pour toi. Sauf que... Sauf que, chez Cindy, je me suis rendue compte que la raison de ton choix, ça pouvait être moi. Trop de tension du côté des ligaments du bassin, j'étais peut-être assise trop longtemps/souvent, j'étais peut-être trop stressée... C'était peut-être les deux à la fois ou autre chose, on ne savait pas mais on allait essayer de te convaincre de te tourner. J'ai de nouveau passé 30 minutes en pont, la tête en bas, puis elle a détendu mes ligaments et m'a envoyée marcher pendant une heure pour te laisser le temps de bouger. Ça faisait des semaines que je marchais comme une grand-mère et me ballader pendant une heure me paraissait impensable mais je me suis concentrée sur toi et je suis partie dans ce joli sentier dans les bois, derrière chez elle. Au bout d'un moment, je me suis mise à chantonner « tête en bas, cul en l'air » en caressant mon ventre en cercles pour te montrer le chemin. On t'avait sentie bouger toutes les deux, tu avais réagi au toucher de Cindy et avait essayé de la repousser mais, de nouveau, je ne savais pas vraiment si tu t'étais retournée...
Ça, c'était mardi. J'ai voulu te laisser qq jours pour te retourner. Après tout, on était certains que tu allais dépasser ta DPA. J'étais dilatée depuis une ou deux semaines mais à part ça, rien ne semblait bouger. Je n'avais pas de contractions et, suite à tous mes exercices pour te faire tourner, tu étais de nouveau assez haut. Ton papa avait déjà pris congé pour la semaine d'après. J'ai donc pris rdv pour faire une écho le lundi matin. On allait voir Kelli en début d'après-midi et si l'écho nous montrait que tu étais encore en siège on allait retourner chez Cindy.

Pendant le reste de la semaine, j'ai continué à me mettre en pont, je me suis remise à marcher, à bouger et je passais des heures à discuter avec toi, à te parler, à t'expliquer pourquoi j'avais besoin que tu te retournes sans perdre de vue que toi, mieux que quiconque, savait quelle était TA position et pourquoi. Je te faisais confiance. Si tu restais en siège, je l'accepterais même si je n'en apprenais jamais la raison. C'était à toi de choisir ta position et ça me suffisait comme raison.
Le samedi 18, on est allés se promener dans le quartier avec ton papa. On a marché une bonne vingtaine de minutes puis on a décidé d'aller voir un film. Ça faisait plusieurs mois qu'on était pas allés au cinéma, rester assise si longtemps sur un siège qui n'était pas mon ballon de gym me faisait peur mais là, ce jour-là, j'avais envie. On est allés voir Knowing avec Nicolas Cage. Film sympa dans l'ensemble mais fin assez décevante. Tant pis, on avait passé une soirée relaxante
Au retour, on voit des voitures freiner pour regarder qqchose et, au bord de la route, un jeune gars qui aidait une fille à se relever. Une fille tombée sur la route, le rétro du gars explosé, je dis à Bryan de se garer et d'appeler une ambulance. Il est 22H. Je sors de la voiture pour aller voir si je pouvais aider et... je reste pétrifiée, debout à côté de la voiture, en sentant un liquide chaud couler le long de ma jambe. Je me retourne et, avec un petit rire nerveux, je dis à ton papa « je pense que je perds les eaux ». Choqué, il regarde mes jambes, juste à temps pour voir une petite tache recouvrir la totalité de mon pantalon en qq secondes. Bon... je ne bouge plus, c'est donc lui qui rejoint les accidentés pour s'assurer que tout va bien. Je reste à côté de la voiture, les jambes ouvertes. Ça coule, ça coule... Quand la police est arrivée, il leur a dit qu'il avait une urgence de son côté aussi et qu'il allait les laisser. Pendant qu'il expliquait à l'un des policiers (qui s'est empressé de lui dire de me rejoindre), l'autre s'approchait de moi pour me demander si j'avais vu l'accident. Il faisait noir, certes, mais j'avais encore les jambes écartées et un filet d'eau qui coulait... Ça n'a pas eu l'air de le surprendre plus que ça et il est reparti.
Bon... Et maintenant ? Comment on fait pour retourner à la maison ? Bryan avait une chemise dans la voiture, il l'a mise sur mon siège. J'ai trouvé un sac plastique que j'ai mis en-dessous et on est repartis.
Le temps d'arriver à la maison, mon pantalon et la chemise étaient tous les deux complètement trempés. Et ça continuait à couler... J'appelle Kelli qui me dit que si elle n'a pas de nouvelles pendant la nuit, elle viendra nous voir le lendemain matin. J'envoie un message sur facebook à Cindy qui m'envoie son numéro de portable et me dit de l'appeler à n'importe quelle heure. Je suis excitée, nerveuse, mais à part cette eau qui coule et qui continue à tremper les inserts de tes couches et les serviettes sur lesquelles je m'assieds, il n'y a rien qui se passe. Vite, vite, c'est notre dernière occasion d'emplâtrer mon ventre. C'est fou, on voit clairement la différence après tout ce liquide qui est parti...

Bryan s'en va fêter ça avec ses copains, il reviendra dans une heure. Je finis les lessives avec tes vêtements que j'avais commencées le matin, je m'agite, je n'arrive pas à rester en place. J'ai bien sur prévenu tes copines d'au naturel mais le reste du monde devra attendre. Je commence à avoir des petites crampes, comme si j'avais mes règles. Vers minuit, aoutch ! Ok, ça c'est une contraction... C'est parti, donc ! Il est minuit, je devrais aller me coucher. Les lessives, le ménage, le forum, tout ça peut attendre, faut que j'aille me reposer ! Je suis trop excitée pour ça... Et puis les contractions sont plus douloureuses quand je suis couchée. Elles sont encore très irrégulières. Je les chronomètre pendant une heure, en discutant avec ta tante Teressa qui est toute excitée, elle aussi. 3 minutes, 3 minutes, 6 minutes, 6 minutes, 6 minutes, 5, 3, 8... Il est tard, il faut que j'essaie de dormir. Je me recouche. Ça coule, ça coule...

Je ne sais pas quelle heure il est quand Kelli nous appelle. Les contractions se sont espacées, on a le temps, mais je lui demande de passer, juste pour voir quelle est ta position. En tâtant mon ventre, on pense tous que tu as la tête en-bas mais avec ce placenta entre nous, comment être surs ? J'accepte qu'elle m'examine. Au contact de ses doigts, mon col passe de 2 à 4 cm en un instant et... zut, un pied. Ton pied est presque engagé dans mon col. Tourne-toi, ma belle, tourne-toi... On appelle Cindy et, en attendant, on essaie de te faire tourner en posant de la glace sur ta tête.



Cindy arrive, se met au travail aussi.







Les heures passent. Je suis impressionnée par la quantité de liquide que je continue à perdre. Kelli m'a donné une couche, c'est plus simple et puis je suis presque à court d'inserts et de serviettes... Ton oncle Steve est arrivé, il est dans le jardin avec ton papa et il attend. Examen interne. Oh ! Ton pied a bougé, ce sont maintenant tes fesses qui se présentent. Mais non seulement tu es en siège, tu es aussi postérieur. Mademoiselle a vraiment décidé de sortir comme elle le voulait ! Mademoiselle ? Kelli ne pense plus au fait qu'on ne connaît pas ton sexe et, en me parlant de ta position, elle me dit qu'elle a bien senti tes testicules. J'ai trop mal pour être choquée mais j'appelle Bryan pour le lui dire. Il sort annoncer la nouvelle à Steve et je les entends crier de joie tous les deux. Petit garçon, donc. Ok. J'ai mal. Je n'ai pas fait de préparation à la naissance. Je me souviens d'exercices de gestion de la douleur lus ici et là, j'en essaie un ou deux mais putain, j'ai maaal ! En fait, la seule chose qui aide (c'est aussi la première que j'ai faite), c'est de me concentrer sur toi, de t'encourager, de te répéter qu'à deux on y arrivera. Je sens mon corps qui s'ouvre pour toi et je respire doucement, profondément, pour toi...

Je ne me laisse pas emporter par la douleur, je n'arrive pas à arrêter mon cerveau qui réfléchit à plein de trucs bizarres. Appeler mes parents, envoyer les messages sur facebook, les mails, annoncer à tout le monde que j'accouche. Merde, on n'a rien à manger. La veille, j'avais préparé ma liste de courses. J'envoie donc Bryan et Steve au supermarché. Ils se moquent de moi « tu vas cuisiner ?? » Oui. Non, merde j'en sais rien, on n'a rien à manger ! Kelli et Cindy sont là depuis ce matin, il est passé midi, il faut qu'elles mangent. La piscine est gonflée depuis ce matin, j'ai besoin d'eau. Laissez-moi, j'en ai marre, laissez-moi !



Il est trop tôt pour la piscine, tu es encore en siège et Kelli et Cindy font ce qu'elles peuvent pour te convaincre de te retourner. Laissez-moi au moins prendre une douche ! AOUTCH ! Pas une bonne idée, finalement, la douche... Merde, j'en ai marre, qu'est-ce qu'on fait ? J'entends Kelli parler au téléphone « non, ça ne la dérange pas d'accoucher vaginalement, malgré le siège. Ben non, moi non plus ça me dérange pas... » Ça veut dire que... ? Je n'ose pas demander, je l'embrasse et je retourne sur le canapé, les fesses hautes, sur des coussins. Et on recommence... 6 cm... Kelli me parle,je l'entends de loin « ce que tu pourrais faire c'est me virer, là maintenant. Tu restes à la maison le plus longtemps possible et, en dernière minute tu vas à l'hôpital. Ils n'auront pas le choix, si bébé est engagé, ça se fera vaginalement. » Virer Kelli. Bryan n'acceptera jamais. Et j'ai peur. Je ne réponds pas.






On va dans la chambre, je leur demande d'installer le trapèze au plafond. Ça me soulage. Elles me complimentent toutes les deux sans arrêt, s'étonnent de mon calme. Je les entends parler « moi, à ce point-là j'étais hystérique... » mais je ne me sens ni calme ni zen ni courageuse ni rien du tout. Pendant les contractions, je suis avec toi mais entre elles, je n'arrive pas à me déconnecter de ce qui se passe autour de moi. Je pense... au dernier groupe de mails que je n'ai pas encore eu le temps d'envoyer... :-D
Elles essaient de te retourner à la main. L'une pousse ta tête, l'autre tes fesses. J'ai maaaaal putain, j'ai MAL ! Tu bouges. Tu es en transversale. Entre deux contractions, je me lève « le lit, on n'a pas fait le lit ! Le sac avec les draps et la nappe en plastique est là ! » Ça les fait rire... Les alèses qu'on utilise suffisent amplement. Tu bouges, tout doucement... Ton coeur bat normalement, pas plus vite, pas plus lentement, elles me disent que tu es aussi zen que moi.

Bryan et Steve sont revenus, je ne sais pas trop quand. Bryan évite la chambre, je crois qu'il ne veut pas me voir avoir mal. Je ne sais pas, je ne sais plus. Ma piscine, putain, je veux ma piscine ! J'appelle Bryan, je lui dis de remplir la piscine. Kelli me dit que c'est trop tôt, que rien n'est encore joué. Je m'en fous. Si elles arrivent à te tourner, il FAUT que cette piscine soit pleine. Si elles arrivent à te tourner, j'ai besoin de savoir que je pourrai m'immerger et oublier tout le reste.
Examen interne (laissez-moi tranquille, j'en peux plus !) et hop, tes fesses sont de nouveau là.
J'en suis à 8 cm, mes contractions sont de plus en plus fréquentes.
Il va falloir y aller. On ne peut plus attendre.
Ok, ok, on y va, faites ce que vous voulez, je m'en fous, je veux que ça s'arrête ! Je veux mon bébé ! J'envoie le dernier groupe de mails et un message pour les filles du forum, affalée sur mon ballon.



Kelli appelle l'hôpital pendant que Cindy prépare mon sac. Au moment de partir, Kelli aurait dit à Bryan que n'importe où ailleurs on serait restés à la maison, elle rale contre cette loi stupide qui lui interdit de nous accompagner à domicile... De mon côté, je ne suis plus capable de réfléchir, je suis dans la voiture, à quatre pattes, j'essaie de m'accrocher à n'importe quoi pendant les contractions. « courage, 10 minutes et on y est » je ne compte pas mes contractions, je ne sais pas où j'en suis, je veux mon bébé !
On arrive à l'hôpital, à l'entrée où ils nous avaient dit d'aller. « Ah non madame, fallait entrer par l'autre côté ! » Bande de *** ! Hop, dans une chaise roulante, on file vers les urgences. Je m'accroche où je peux pendant les contractions. On dit à l'équipe qui m'attend que j'ai perdu les eaux ce matin, vers 11H. S'ils savaient que je les avais perdu plus de 18 heures avant, on (moi ? Toi ? Nous deux ?) aurait droit direct à des antibio...

Ils me couchent sur un lit... C'est flou, je ne me souviens pas... j'ai les bras écartés. Ils m'ont dit pourquoi mais je suis ailleurs, je veux que ça s'arrête, je veux mon bébé ! Tu vas bien, ils écoutent ton coeur en continu et tu vas bien... « Signez ça, madame... » C'est ça, oui, j'ai rien d'autre à foutre que de signer tes papiers. Je leur dit de faire signer tt ce qu'ils veulent à Bryan et Kelli. « Ah non, madame, c'est votre signature qu'on veut ! » Bande de crétins ! Bon... ben va falloir que vous attendiez entre deux contractions, hein...



« Est-ce que vous êtes allergique à qqchose ? » Non, laissez-moi tranquille ! « Signez cette décharge... » Mais j'en ai déjà signé 3 ! « Est-ce que vous êtes allergiques à qqchose ? » NON je vous dis, non ! « (...) vitamine K (...) yeux » NON, vous ne toucherez pas à mon bébé ! « Signez ici si vous refusez les traitements machin... » « Est-ce que vous êtes allergique à qqchose ? » Mais vous communiquez, parfois, vous, entre vous ?? Laissez-moi tranquille ! Je suis venue dans votre hôpital, conduisez-moi au bloc et qu'on en finisse, merde ! Kelli, aide-moi ! Dis-leur ! Ils ont intégré Kelli dans leur équipe, elle bosse, passe de l'un à l'autre, aide le plus qu'elle peut, remplit mon dossier, répond aux questions... L'anesthésiologiste arrive, c'est bientôt fini « Vous êtes allergiques à qqchose ? » J'ai envie de hurler. Laissez-moi sortir de ce lit, je veux me relever ! Je me suis à moitié retournée, ça soulage un peu... On vient m'examiner, voir où en est mon col... « Oooh, ça c'est un garçon ! » (ça valait bien la peine qu'on attende pour la surprise, tiens...) le médecin se retourne vers Bryan « Monsieur, ne vous inquiétez pas si ses testicules sont vraiment gonflées. C'est à cause de la position... » Ok, ok, on s'inquiétera pas, vous pouvez me laisser tranquille maintenant ? « On va y aller. » Bryan peut venir avec moi, hein ? Et Kelli ! Je veux Kelli ! « On ne sait pas, on va voir... » Kelli !! Ils l'acceptent, elle reste à côté de moi. On pousse mon lit jusqu'à la salle d'opération, je ne sais pas trop comment je me retrouve sur cet autre lit.



J'ai des tuyaux partout, on m'explique l'épidurale... Oui, allez-y, merde ! Ils tirent un rideau devant moi, je ne sens plus mes jambes. Au secours !! je n'ai plus mal... Mais je ne sens plus rien, je ne te sens plus, cette douleur qui nous rapprochait... Je les sens qui me coupent. C'est bizarre comme sensation, ces mains qui me coupent, je ne les vois pas, elles ne me font pas mal, je sens juste qu'elles sont là et qu'elles coupent. Je veux voir ce qui se passe !



Laissez-moi au moins voir ! Pas encore, j'ai pas le droit... Ils mettront le miroir quand il sera temps de te sortir. Ils me disent que ton coeur est toujours aussi bon, qu'il bat normalement... Ça y est, ils apportent le miroir. C'est rouge, c'est ouvert, c'est mon ventre, ça ? Je suis ailleurs, de nouveau, je ne comprends pas ce qui se passe, je veux te voir... Et tu es là, hors de mon ventre, joli bébé plein de vernix, tu cries...



Oh, mon ange, ne crie pas, je suis là. Je ne sais pas si j'ai eu la force de te parler, je ne sais plus. J'entends juste le médecin dire « Et c'est, ahahah, un petit garçon ! (...) Euh... C'est une fille ! » Je souris. Je les vois qui s'agitent. Le cordon ! Hey, le cordon ! Ils n'ont pas coupé le cordon, quand même ? Pas si vite ? Pas comme ça ? Non, ils n'ont pas fait ça... C'est juste que je ne comprends pas ce que je vois... Mais ils t'éloignent ? Mon ange ? Mon bébé ? Le cordon n'est plus là ! Est-ce que j'ai dit quelque chose ? Est-ce que j'ai crié ? Je ne sais plus... j'ai enterré ce souvenir, il est quelque part au fond de mon coeur mais je l'ai caché. Ils te prennent loin de moi. Kelli te suit. Je demande à ton père de te suivre, de te parler, de te faire savoir qu'il est là, à côté de toi. Ils ont bougé le miroir pour que je puisse te voir. Je te regarde, ma petite princesse. Si fragile, si loin... Rendez-moi mon bébé ! Je ne peux rien faire, je ne peux pas me lever, je reste là à te regarder.



Je veux bouger, je veux te rejoindre mais mes jambes ne répondent pas. J'ai une pensée pour toutes ses femmes qui subissent cette *** de péridurale par choix et je ne comprends pas. J'essaie de bouger mes pieds, je me bats contre mes orteils... Rien. Et tu es si loin... Mon bébé ! Je veux mon bébé ! Une infirmière t'amène enfin.



Elle te met sur moi, elle attrape mon sein et met ta tête dessus. Elle me paraît si brutale. Pourquoi si peu de tendresse ?



Tu es sur moi pour la première fois et c'est comme si elle violait notre moment si précieux. Elle te pousse contre mon sein, te fait ouvrir la bouche.





Je voudrais prendre le temps de te voir, de te regarder, de te dévorer des yeux. Ça y est, tu tètes, elle nous laisse tranquilles.





On est à deux et tout le reste disparaît. Tu es couchée sur moi, tu bois et je sais que plus rien ne peut nous arriver...

je ne sais quoi dire ma pitchounette, mais

je ne sais que dire.........c'est un tres beau recit, tellement vrai et tellement fort. te lire si confiante si mere avant meme l'arrivee de Joyce c'est magnifique

Tu as des nouvelles de Kelli depuis ? C'est elle qui fait tes soins post-partum ?

C'est dur... C'est fort aussi!
Je t'embrasse Ilekounette, je t'embrasse toi et ta chipounette
Tu as été la meilleure!

c'est plein d'émotion !!!
je vous embrasse bien fort toi et ta princesse

Bon sang tant de force et de tendresse dans le même temps
J'ai les larmes aux yeux

C'est très rare que je pleure en lisant les récits d'accouchement, mais là je peux pas m'en empêcher...

Chapeau bas, Ilek!

Moi non plus je ne trouve pas mes mots... C'est dur que ce se soit passé comme ça. Mais quelle sagesse quand tu acceptes que ta fille savait ce qui était le mieux pour elle même si on ne connaîtra pas sa raison Bravo ! Et encore plein de beaux voeux pour Joyce !

C'est magnifique Ilek !
Tellement magique bravo à vous pour ce travail.

Rhola, j'ai les larmes aux yeux, ton récit est magnifique, d'habitude je survole les longs récits, mais là....
Elle sera heureuse de le lire, de savoir, de comprendre, quand elle sera femme, c'est un beau cadeau =)

je ne trouve pas bien les mots... je suis toute émue...

Je suis triste que cela soit passé de cette manière pour toi Ilek, mais en tout cas, tu es conquise par ta fille qui a décidé de venir en siège
pleins de pour Joyce et ses parents

bravo pour ce beau récit, et surtout pour la façon dont tu as géré tout ça...
c'est un chouette cadeau pour la petite Joyce!

Je suis vraiment émue...

...et pour le titre !

je ne sais pas quoi dire c'est tellement triste et en même temps il ya tellement d'amour

Il est à la fois très beau et très difficile, ce récit...
Mais comme on te sent forte!