[AAD] Tout simplement...

Je vous livre ce que j'ai écrit dans le cahier de ma puce à propos de sa naissance:

"Plusieurs fois déjà, j'avais cru ce grand jour arrivé, plusieurs fois j'avais eu des séries de contractions, une fois même j'avais mis des bougies au salon et puis j'avais fini par les éteindre et m'endormir...
Et puis il y a donc eu CE jour, oup lutôt CETTE nuit, le 31 juillet vers une heure du matin, j'ai perdu du sang, suffisamment pour que ça m'inquiète un peu, alors j'ai appelé R. ma SF, il était une heure quinze, elle ne dormait pas, elle attendait mon appel, elle m'a dit "j'arrive", j'avais quelques contractions, sans plus mais quand même, je crois, ce je-ne-sais-quoi qui fait que l'on sait que c'est "LE JOUR", celui que l'on attend depuis longtemps, celui de "LA RENCONTRE". J'ai demandé à ton papa d'emmener tes soeurs chez ma marraine comme prévu, on leur a enfilé un peignoir, j'ai préparé un petit sac et elles sont parties sachant elles aussi que maintenant très bientôt elles allaient enfin te voir.
R. est arrivée à peu près une heure après mon coup de fil, j'étais très zen, les contractions étaient tranquilles, elle m'examine, confirme que le travail a bien commencé mais que ce n'est pas pour tout de suite. Forcément puisque je t'ai demandé d'arriver une fois que le matin arrive avec ses bruits, je ne voulais pas briser le silence de la nuit!
Après quelques mots, un café, ton papa et R. se couchent, j'attends un peu et je me couche aussi, enfin si on peut appeler ça couché puisque je suis en gros à 4 pattes, c'est la seule position à peu près confortable, comme ça, les fesses en l'air, le ventre dans le vide, la tête sur un coussin j'arrive dormir un peu entre les contractions.
Vers 5 h, l'une d'elles me réveille vraiment, je me lève, je vais au salon, je m'installe sur le ballon et fais tourner mon bassin, je bouge doucement sans arrêt, je me berce, je te berce, je sais que le moment de notre rencontre approche et que les moments qui vont suivre vont être intenses, intenses comme ces contractions qui maintenant m'obligent à souffler pour mieux les vivre, pour mieux les prendre, pour mieux m'ouvrir, mais pour l'instant encore je savoure ma solitude dans le petit matin, le jour qui se lève, les oiseaux qui le saluent, ce jour, celui de ta naissance.
Au bout d'un moment, le travail s'intensifie encore, je ressens le besoin d'être soutenue par ton papa, je vais le réveiller, je m'installe sur le ballon devant lui, entre ses jambes, je lui tourne le dois, pendant les contractions la chaleur de son ventre dans mon dos me fait du bien.
Vers 6h15, R. nous rejoint, réveillée par le bruit de mes respirations pendant les contractions, elle dit quelque chose du genre "Ah, ça se précise!" d'un air joyeux, moi, je suis entrain de basculer de l'état "tout va bien, ça peut encore durer des heures" à "Là, ça ne va plus, il faut que ça cesse..."
Mes souvenirs sont un peu plus vagues à partir de là aussi, sans doute parce que je passe de l'intellect au corps, de l'humain à quelque chose de plus mammifère... Je sais que R. a pris la direction des opérations, elle m'a suggéré de me lever du ballon, de prendre une autre position, je sais que l'on en a essayé plusieurs, enfin pas tant que ça en fait, 2 avant celle que j'avais à ta naissance. Je crois que j'ai d'abord été à genoux, appuyé sur le lit, debout ensuite mais là mes jambes tremblaient trop pour pouvoir envisager rester dans cette position et donc finalement accroupie.
Tout ça avec ces vagues qui me submergent, ces tourbillons qui m'emportent, tout ça avec R. et ton papa à mes côtés mais pourtant quand même si loin puisqu'à l'extérieur de moi alors qu'à l'intérieur mon corps s'ouvre. La poche des eaux a éclaté quand j'étais debout, j'ai imaginé que ça en avait mis partout mais n'ai après coup trouvé aucune trace... R. m'a massée, encouragée et constamment empêchée de sombrer dans la panique.
Une fois accroupie, je crois que j'ai commencé à sentir ta descente ...et ta remontée puisque tu faisais un peu des allers-retours au gré de mes poussées, des contractions et mes appréhensions, je me rappelle me remémorer des passages du livre d'Isabelle Brabant sur le fait d'apprivoiser cette sensation, je crois que R. m'a demandé si j'avais peur mais sans que je puisses lui répondre, je me rappelle me dire avec ironie et sans que ça ne soit du tout lié à une envie de partir à l'hôpital "mais pourquoi j'ai voulu accoucher à la maison!"... et puis R. m'a forcé à regarder dans un miroir et j'ai vu tes cheveux tout près et du copu, tout ça reprenait sens et à la contractions uivante, je crois que tu naissais, je crois presqu'en une fois, il n'y a pas eu de pause entre ta tête et le reste... Il était 7h46...
R. ta attrapée et je t'ai prise contre moi, en passant d'accroupie à assise par terre... voilà tu étais née... tout simplement...
Ton papa a été derrière moi et m'a soutenue tout ce temps, il a supporté mes humeurs, mes tiraillements, mes écrasements, il a passé outre son appréhension pour me permettre de te mettre au monde chez nous, dans cette chambre d'où je t'écris aujourd'hui, dans cette chambre où tu dors à mes côtés. Je t'entends respirer et faire des petits bruits dans ton sommeil, le 31 juillet tu as poussé ici ton premier cri, tu as pris ta première bouffée d'air, ta première tétée, le 31 juillet tu nous a montré ton visage mais ça faisait déjà bien longtemps que tu étais entrée dans notre vie.
Emma, prendre sur soi l'être qu'on a eu 9 mois dans son ventre, cet être encore si plein du dedans de soi, c'est unique, il a une odeur, une chaleur que plus jamais on ne retrouvera, je te souhaite de connaître ça un jour...
Je t'aime
S. ta maman"

édité pour corriger des fautes de frappe

Voilà donc le récit de la naissance de ma puce, née tout simplement sans musique, sans bougie, sans encens, ni rien d'autres de ce que j'avais pu peut-être imaginer, elle est née tout simplement comme je suis en fait ... sans chichi! Tiens du coup les larmes m'en viennent maintenant alors qu'elles ne sont pas venues en écrivant le récit...

Je rajoute que vers 10h, j'ai eu envie de me lever, j'ai pris une douche, j'ai mangé des croissants avec gros appétit, j'ai savouré à pleines dents le fait d'être chez moi et de pouvoir faire comme bon me semble, on avait fermé les fenêtres juste après la naissance et les bruits de la ville nous parvenaient atténués, nous étions dans une bulle, R. est partie vers 11h, monsieur est allé récupérer nos deux grandes, à leur arrivée, leur enthousiasme a fait éclater cette bulle, la vie reprenait son cours et c'était bien ainsi.

C'est simplement superbe...

Quel beau récit, pour une naissance si sereine ...
C'est très émouvant.

merci pour ce très beau récit...

merci pour le partage

Oh oui, merci
C'est un des plus beaux textes de naissance que j'ai lu...je le vivais avec toi, et moi qui ne pleure pas facilement, j'avais besoin d'essuies glaces pour mes mirettes

Merci pour ce beau récit

C'est vrai que notre cerveau nous fait oublier la douleur de la fin, il ne reste que le meilleur, le bonheur.

c'est un beau récit, un beau souvenir écrit par sa maman pour Emma

waouh!

C'est magnifique, plein d'émotions et un très beau cadeau pour ta fille de lui laisser cette trace

Ça faisait un moment qu'on attendait ton récit... Et, wow, ça valait la peine d'attendre ! tout simplement superbe

c'est un récit très émouvant!

rhaaaa!!! Et voilà grâce à toi j'ai retrouvé ma bonne humeur! Merci!

Merci les filles, vous allez me faire rougir! (je vois pas bien ce qu'il a de spécial mais merci quand même)

Il est beau, ton récit
J'en pleure d'émotion (une fois de plus, vivent les hormones )

Arf, mes yeux sont mouillés

alsoleo a écrit:

(je vois pas bien ce qu'il a de spécial mais merci quand même)

Rien, justement Rien de spécial... c'est une naissance toute simple, toute douce, toute naturelle comme on en rêve toutes

à toi aussi! et je te souhaite ce dont tu rêves!

merci pour ce rayon de soleil

Je viens de relire mon récit après avoir lu celui de Lune, elle décrit tellement bien la panique, l'angoisse, je suis venue relire pour voir "ma mémoire" et je dois bien constater que j'ai plutôt zapé sur ma panique...

Ce que je voudrai rajouter aujourd'hui à mon récit, c'est que maintenant je sais qu'un vagin c'est pas très long, que ma panique me l'avait fait oublier et que le coup d'oeil dans le miroir me l'a rappelé!!!

alsoleo a écrit:

Je viens de relire mon récit après avoir lu celui de Lune, elle décrit tellement bien la panique, l'angoisse, je suis venue relire pour voir "ma mémoire" et je dois bien constater que j'ai plutôt zapé sur ma panique...

C'est drôle ce que tu dis parce que j'ai l'impression que mes sensations de panique et d'angoisse se sont beaucoup atténuées 2 ans après, et que j'ai eu beaucoup de mal à les restituer !